#aïnous
Il faut être idiot
pour composer des poèmes
Sans que je le veuille
cette pensée s’insinue
tout à coup dans mon esprit
*
Qui d'autre que moi
oserait se lancer dans
pareille besogne,
un travail qui ne rapporte
ni la gloire ni l’argent
*
Voilà, c’est ainsi
la vie qu’aujourd’hui je mène
me la suis choisie
Même si j’ai de la peine
mon chagrin me réjouit
*
Parfois j’imagine
ma pauvre vie semblable à
une comédie
et pour oublier mon mal
j’en fais de la poésie
*
Ah que je voudrais
me trouver un bon travail
qui rapporte bien
Alors terminée la honte
de n’être qu’un parasite
*
Le monde des hommes
déborde tant de misère
Qu’y voyons-nous d’autre ?
Doit-on se répandre en larmes
ou esquisser un sourire ?
*
Comme j'aimerais
me trouver un bon boulot,
une place qui
me permettrait d’oublier
la tristesse que je couve
*
Je croyais vraiment
que nul ne me comprendrait
pourtant quel bonheur
d’avoir trouvé un ami
sachant me réconforter
*
On en pleurerait !
Tombé dans la misère
un mendiant aïnou
que les enfants sans arrêt
s’amusent à tourmenter
*
Le voici qui pleure
ce clochard aïnou qu’une
bande de gamins
ne cesse de taquiner
Je détourne mon visage
*
Je pourrais toucher
une bonne paie à cette
usine de harengs
De l’argent il m’en faudrait…
— Bouge-toi pour en gagner !
*
Quel désastre si
la pêche n’était pas bonne
cette année encore
Les Aïnous ne pourraient
plus rester à Yoichi
— Hokuto Iboshi, Chant de l’étoile du nord, Éditions des Lisières (traduction de Fumi Tsukahara et Patrick Blanche)